Accidents du travail : l’impôt du sang

Le 25 juillet de cette année, un ingénieur de la SNCF est mort au travail dans des circonstances atroces : il a été enseveli vivant suite à un éboulement sur un chantier. Un quotidien de province a publié cette information dans sa rubrique « faits divers » en ne s’attachant quant au contenu de l’article qu’aux conséquences impactant les voyageurs et le trafic des trains. Un grand site d’information nationale a titré de façon lapidaire « Accident de chantier mortel à Massy : le trafic SNCF a repris, annonce le ministre délégué aux Transports Jean-Baptiste Djebbari », là aussi le traitement de cette information pourtant tragique reste axé sur l’impact de l’accident sur la circulation des trains. Un autre grand hebdomadaire français a présenté les faits de façon similaire : en se contentant de disserter sur l’altération du trafic ferroviaire. Ces analogies sont troublantes et montrent bien comment sont traités médiatiquement les accidents du travail, comme des faits divers isolés, compris indépendamment les uns des autres, faits divers narrés avec une inhumanité sidérante : la victime est reléguée à l’arrière-plan derrière les inconvénients pour les voyageurs et les retards de train. Le pire est sans doute la réaction telle que rapportée par ces mêmes organes de presse du ministre délégué au Transport qui a été d’annoncer la reprise du trafic sans un mot pour la victime et ses proches, avec un manque de considération total pour ces derniers, le cynisme froid de nos dirigeants laisse sans voix.

Les accidents du travail ne sont pas des faits divers et ne doivent pas être traités comme tels, ils ne sont pas non plus une fatalité, ils sont la conséquence de mauvaises conditions de travail, de la précarité, de la casse du code du travail et de la fragilisation des instances juridiques de protection des salariés. Les dernières réformes du code du travail n’ont pas fait que précariser un peu plus les travailleurs, elles ont fait des morts, des blessés, elle ont fait augmenter « l’impôt du sang » que les patrons font payer aux salariés sous forme d’accidents de travail quand ils laissent sciemment les conditions de travail se dégrader ou augmentent la pression au rendement au mépris des règles de sécurité.