A six mois de l’élection présidentielle, l’espace politique et médiatique est saturé par le racisme nauséabond des déclarations d’Eric Zemmour, ce nouveau champion de l’extrême-droite la plus réactionnaire nous abreuve de saillies sexistes, racistes, voire révisionnistes. Le trublion néo-fasciste multiplie les outrances, surpassant le Rassemblement National en matière de xénophobie, comment ses positions affectent-t-elles le débat à six mois de l’élection présidentielle ?
Une des propositions récurrentes de l’extrême-droite est la préférence nationale, ce concept qui a été théorisé par Jean-Yves Le Gallou, cofondateur du Club de L’Horloge, célèbre think tank d’extrême droite, devrait selon les leaders de l’extrême droite française s’appliquer en matière d’aide sociale, d’accès à l’emploi ou de logement social, or cela serait anticonstitutionnel, constituerait une discrimination et serait contraire au principe d’universalité du service public.
Par ailleurs, une certaine forme de préférence nationale existe de fait déjà dans plusieurs secteurs : les étrangers extra-communautaires ne peuvent être recrutés dans la fonction publique, les postes dans la police, la justice et la défense sont strictement réservés aux français. L’accès aux aides sociales connaît déjà des limitations strictes mais malgré le durcissement des conditions d’obtention de l’aide sociale, aucun effet sur les flux migratoires n’a été observé et pour cause : les déplacements de population sont liés aux raisons qu’ont les migrants de quitter leur pays d’origine, pas aux conditions d’accueil. En outre la préférence nationale est sans effet sur le chômage, la main d’œuvre immigrée occupant les emplois que les travailleurs nationaux délaissent. La mise en avant de ces thèmes n’est pas innocente, quelles sont les stratégies politiques à l’œuvre derrière ces coups d’éclat médiatiques ?
Eric Zemmour a réalisé une habile manœuvre en se positionnant d’emblée à la droite du Rassemblement national, il a pris le parti d’aller au-delà des propos tenus habituellement par le parti de Marine Le Pen, jouant délibérément la carte d’un discours ouvertement raciste, décomplexé et assumé, faisant fi des condamnations pour incitation à la haine dont il a fait l’objet. Ce positionnement a eu pour conséquence une focalisation du débat politique de la présidentielle sur les thèmes de prédilection de l’extrême droite, contraignant les autres candidats à mener campagne sur ces thèmes, à agir en réaction aux propos de Zemmour. Autre conséquence de ce coup médiatique : certains candidats se sont laissés entraîner dans une dynamique de surenchère xénophobe mortifère, qui au bout du compte ne profitera qu’à l’extrême droite, les électeurs préférant toujours l’original à la copie. Enfin, la focalisation du débat politique sur les thèmes préférés de l’extrême droite que sont l’insécurité et l’immigration a aussi eu pour effet d’occulter les thèmes socio-économiques cruciaux que sont le chômage, les délocalisations, la pauvreté grandissante, problèmes que l’extrême-droite est bien incapable de résoudre, et sur lesquels elle n’a rien à dire.
Eric Zemmour, avec ses outrances et ses provocations à réussi à en quelques sortes confisquer le débat préparatoire à l’élection présidentielle, évacuant les thèmes socio-économiques au profit des questions soulevées par l’extrême droite, une fois de plus on assiste au triomphe de la politique du bouc émissaire : l’extrême droite qui n’a pas l’ombre d’une vraie solution pour lutter contre la désindustrialisation et le chômage accable les immigrés pour mieux dissimuler son incompétence.