Investissements hospitaliers dans le Grand Est

Les mobilisations des personnels hospitaliers depuis deux ans ont contraint le gouvernement à des concertations (la grand messe du « Ségur de la santé ») et à des annonces. C’est ainsi que l’ARS du Grand Est met en consultation la stratégie régionale d’investissement en santé pour les 10 ans à venir … qui ne concerne que les petits investissements, les autres étant décidés nationalement.

Cette stratégie ne déploie que des objectifs essentiellement consensuels : qui pourrait être en désaccord avec la co-construction, le décloisonnement, la proximité, la confiance donnée aux acteurs de santé, la nécessité de réduire les inégalités de santé et de mettre les usagers et les professionnels au cœur de la réflexion ?

Pourtant ce plan est très loin de répondre aux besoins des populations du Grand Est.

– La masse des crédits est sans rapport avec les besoins : les sommes annoncées pour les dix ans à venir sont dans un rapport de 1 à 10 avec les projets déposés par les établissements de santé et médico-sociaux auprès de l’ARS : 304M pour 3,1Md demandés pour les établissements de santé, 29,4 M€ pour 228 M demandé pour le médico-social, le rapport étant même de 1 à 13 pour les établissements tournés vers le handicap.

– L’aide annoncée, sauf pour quelques chapitres, concerne indifféremment le secteur public et le secteur privé : la notion de service public hospitalier est ignorée. Pourtant même la Cour des Comptes dans un référé du 27/06/2019 faisait état de la complexité de l’analyse des finances des établissements privés d’hospitalisation !

– Les indications d’ordre financier sont inquiétantes : on n’aiderait que les établissements les plus « riches » ayant capacité à rembourser les emprunts, en leur proposant sans doute de s’endetter auprès des banques privées pour accompagner la subvention du « Ségur » !

– Enfin, malgré les affirmations de proximité ce plan a manifestement vocation à contribuer aux restructurations fermant urgences, maternité et chirurgie de proximité puisqu’il s’agit de conforter les centres de référence et de recours et de réserver à la proximité le diagnostic et l’orientation, au besoin avec l’aide de la télémédecine. Ce développement annoncé ne pourrait que contribuer à renforcer les inégalités territoriales : une vraie consultation dans les grandes villes et un succédané ailleurs !

Michèle Leflon